Rencontres chamaniques dans les régions de Khövsgöl et de Terelj (Mongolie)

juillet 2015

Je m’intéresse depuis de nombreuses années au lien qui existe entre la transmission transgénérationnelle et le chamanisme. Le chamanisme dispose d’un savoir ancestral sur la santé des vivants mais également sur l’influence des « ancêtres mal morts » sur la vie de certains descendants. Le chamanisme semble aussi être en mesure d’éclairer et de prolonger la recherche psychanalytique qui, quant à elle, n’a commencé à considérer l’esprit sous cet angle que depuis une trentaine d’années avec les recherches et travaux du psychanalyste Didier Dumas.

Dans leurs options thérapeutiques, le chamanisme et la psychanalyse transgénérationnelle s’associent aisément dans la mesure où ils préconisent, tous deux, une exploration des structures psychiques qui sont celles de l’enfant d’avant trois ans. C’est dans ces structures que les pathologies ancestrales, que la psychanalyse transgénérationnelle contemporaine appelle des fantômes, peuvent se transmettre sur plusieurs générations.

Ce voyage en Mongolie était le deuxième voyage d’un cycle de découverte du chamanisme mondial qui a été initié, en partenariat avec l’agence Tamera, en 2014 au Québec avec la découverte de la pratique et de l’enseignement du chef spirituel et medecine-man algonquin T8aminik Rankin. Cet été 2015, le projet était de passer six journées avec trois chamans dont les pouvoirs sont reconnus en Mongolie et de nous immerger dans leur monde et dans leur culture, afin d’appréhender, avec le moins de barrières possibles, le chamanisme mongol sous toutes ses formes.

Partis le 11 juillet 2015 de Bruxelles, Lyon ou de Paris, les participants se sont d’abord regroupés à Moscou avant de s’envoler, avec l’Aeroflot, pour Oulan-Bator la capitale de la Mongolie.

L’arrivée, au petit matin, à Oulan-Bator, après un vol de six heures.

Après les formalités aéroportuaires, qui prendrons peu de temps car l’accès à la Mongolie est facile pour les touristes, un minibus nous dépose devant l’Hôtel Continental au style colonial désuet mais plein de charme.

Pour gérer le plus efficacement possible le décalage horaire, nous décidons de prendre rapidement une douche et un petit-déjeuner et de nous rendre immédiatement en ville, car aujourd’hui c’est le Naadam : la fête nationale mongole. Une foule très dense se masse aux alentours du stade, dans lequel des manifestations folkloriques, des reconstitutions historiques et des épreuves sportives vont se dérouler toute la journée.

Le Naadam qui se traduit par « jeux » est l’abréviation de « Eriin gurvan naadam » qui signifie « Les trois jeux virils ». Il s’agit à la fois d’un festival et d’une fête nationale qui célèbre l'indépendance de la Mongolie par rapport à la Chine. Le Naadam a lieu chaque année les 11 et 12 juillet à Oulan-Bator et se compose des trois sports traditionnels mongols : le tir à l'arc, la course de chevaux et la lutte mongole.

Le Naadam aurait été fondé en 1206 par Gengis Khan et s'est prolongé pendant toute l'existence de l'Empire Mongol. Ce festival a été restauré en 1921 lors de l'indépendance de la Mongolie.

Une foule importante se masse, sous un soleil brûlant, pour admirer les défilés ainsi que les différentes reconstitutions des conquêtes légendaires de Gengis Khan.

Un défilé de voitures anciennes sert de ligne du temps à une rétrospective de l’histoire plus récente de la Mongolie.

Le Naadam est l’occasion d’apprécier de nombreux contrastes dans une ville où modernité et tradition se rassemblent tout naturellement.

La capitale de la Mongolie est à la fois le centre politique, économique, industriel, scientifique et culturel.

La vie à Oulan-Bator a été bouleversée par l'afflux de nomades venus de la steppe. En 2011, l'exode rural a poussé plus de 500 000 personnes vers UB (le surnom que donnent les Mongols à leur capitale). Oulan-Bator est classée comme la seconde ville la plus polluée au monde par l'OMS. Malgré cela, nous avons trouvé cette ville très attachante et étonnamment agréable à vivre.

Notre – longue - première journée en Mongolie s’achève sur un belvédère qui nous permet de juger de l’étendue et de l’insertion d’Oulan-Bator dans son environnement. La ville, s'étire d'est en ouest au fond de la vallée de la rivière Tuul, sur une vingtaine de kilomètres, et rassemble presque un million d'habitants, soit plus du tiers de la population du pays.

Très tôt le lendemain matin, nous nous rendons à l’aéroport pour prendre un vol des lignes intérieures qui nous emmènera à Mörön, la capitale de la province d'Hövsgöl dans le nord de la Mongolie, à quelques centaines de kilomètres de la frontière de la Sibérie.

En attendant notre vol, nous nous mêlons aux voyageurs locaux qui s’enthousiasment, face à l’écran du téléviseur numérique, pour la course de chevaux qui a lieu dans les faubourgs d’Oulan-Bator à l’occasion du Naadam.

Un vol d’environ une heure est prévu, dans le petit Fokker 50, avant d’arriver à l’aéroport de Mörön qui ne dispose que d'une piste bitumée et est desservi par des vols réguliers depuis et vers la capitale. Quelques vols vers les provinces de l'ouest peuvent aussi s'y arrêter.

Avant l’atterrissage nous pouvons constater l’organisation urbanistique de la petite ville mongole dont les enclos parfaitement rangés contiennent, pour la plupart, une cabane colorée, un véhicule et quelques yourtes.

À notre arrivée nous découvrons avec amusement les deux véhicules qui vont nous transporter pendant deux jours, à travers la taïga, pour aller rejoindre le premier chaman avec lequel nous avons rendez-vous. Incontournable, le fourgon UAZ de fabrication russe est un véritable 4×4 tout terrain, « insubmersible » diront certains. Sa capacité de franchissement, sa stabilité et sa robustesse en font un véhicule très polyvalent. Capable de traverser les rivières, de rouler dans la boue, de véhiculer 8 personnes et 450 kilos de matériel, ce véhicule bénéficie d’une excellente popularité auprès des populations nomades qui l’ont adopté depuis sa sortie en 1966, en faisant ainsi une icône de la steppe. Sa présence sur les pistes est un grand bonheur de tous les amoureux de sa silhouette débonnaire.

Ce légendaire fourgon est un tas de ferraille russe peu confortable, mais incassable. Il est peu rapide mais endurant. D’entretien mécanique facile, un marteau et un tournevis suffisent pour les réparations. Information importante: en cas de panne sèche, il tolère, paraît-il, la vodka comme carburant!

Manifestement Michèle et Martine sont ravies de découvrir leur nouveau carrosse capitonné ...

... et le sympathique sourire du cocher.

Mörön désigne à la fois la ville et le district qui la contient. Des vestiges de Möröngiin Khuree, un monastère fondé en 1809/11, demeurent sur les rives de la rivière Delgermörön. Au début du XXe siècle, le monastère avait une population d'à peu près 1 300 lamas, mais il a été détruit en 1937. La période 1937-1939 est marquée par des purges draconiennes contre l'« intelligentsia » tant laïque que religieuse. Une violente campagne anti-religieuse est notamment lancée pour éradiquer la foi bouddhiste en Mongolie. Les quelques 700 monastères que compte le pays sont mis à feu et à sang, les lamas étant tenus pour responsables de la résistance des Mongols à la modernisation de leur pays. Des milliers de moines sont mis à mort: un charnier de 5000 crânes a été découvert en 1991 au nord-ouest du pays mais les experts avancent des chiffres de dix à vingt fois plus élevés. Un nouveau petit monastère de Danzadarjaa Khiid a été érigé à l'ouest de la ville en 1990.

Grâce à la gentillesse de l’un de nos de nos guides locaux, nous sommes invités à partager le thé et quelques gâteaux dans sa famille.

Cette aimable invitation nous permet de découvrir le mode de vie quotidien des mongols.

Aujourd’hui, comme partout en Mongolie pendant les fêtes du Naadam, l’engouement est total pour les différents reportages télévisés dédiés aux trois sports virils qui constituent le triathlon mongol: la lutte, le tir à l’arc et l’équitation.

Il est temps de partir à la recherche de notre bivouac pour la nuit. Nous camperons cette nuit tout près de Mörön car nous devons attendre le vol de demain matin pour récupérer Pauline, une des participantes qui est restée à Oulan-Bator faute de place dans le vol de ce matin.

Penadnt tout ce voyage, nous choisirons systématiquement un lieu de bivouac situé près d’une rivière.

La météo ne s’est pas trompée: les nuages annoncés s’amoncellent et augurent de quelques jours d’une pluie qui va nous accompagner pendant toute la liaison vers le nord et donner aux paysages une intensité et un charme tout particulier.

Cette météo nous permet aussi de prendre la mesure de la rusticité de la nature et de la résistance des animaux et des hommes.

Mais il est décidé que le mauvais temps n’aura pas d’emprise sur la motivation et la bonne humeur de notre groupe...

... car le tout est simplement d’être bien équipé, en toutes circonstances, lorsque l’on part en trekking dans la nature.

Le temps que notre équipe logistique démonte le camp, nous nous dérouillons les jambes pendant une petite randonnée matinale qui nous immerge dans un paysage ouaté aux lignes apaisantes.

Le démontage du camp terminé, les véhicules nous rejoignent, sur la piste, pour nous embarquer, pour une longue journée de liaison très chaotique.

La pression des pneus doit constamment être adaptée à la nature du sol.

Les capacités d’adhérence et de franchissement des petits véhicules russes sont réellement surprenantes sur la piste boueuse et très glissante.

Il paraît qu’en tout terrain, ce genre de véhicule peut consommer jusqu’à 30 litres aux 100 km.

La pluie battante a bien fait monter le lit de cette rivière, qui, une fois franchie, va nous permettre d’accéder à un minuscule hameau où nous trouverons de quoi nous restaurer dans une yourte bien chauffée.

Martine et sa fille Pauline sont très attentives aux explications que donne notre guide Naraa sur les codes et usages à respecter impérativement lorsque l’on est invité sous la yourte d’une famille mongole.

Rassasiés et réchauffés, nous reprenons notre route sous un ciel bas et plombé et sur des pistes de plus en plus boueuses et glissantes.

Au passage d’un col nous rencontrons, pour la première fois, un ensemble d’autels chamaniques.

On en trouve majoritairement en Mongolie et dans les régions chinoises de Mongolie-Intérieure où la culture mongole est omniprésente.

Généralement ils se situent au sommet d’un relief ou d'une montagne sacrée et sont installés à l'occasion de Tsagaan Sar (la fête du printemps chez les Mongols). Le poteau est censé permettre aux hommes de communiquer avec les esprits. Autour du poteau, on empile des pierres, des épieux et des branches de cyprès. Des drapeaux de prière sont fixés au poteau et aux autres bouts de bois. À des cordes fixées au mât, on attache des os de mouton, de petits drapeaux de prière et des lambeaux de tissus.

Ces autels sont censés abriter les esprits des lieux et servent à accomplir divers rituels. Ils sont souvent dressés au point culminant d'un col: le voyageur s'y arrête et ajoute sa pierre ou son offrande pour manifester sa gratitude et pour que le voyage se passe bien.

Après avoir traversé ce village nous pénétreront dans la réserve naturelle du lac Khövsgöl. Le lac Khövsgöl est le deuxième plus grand (après le lac Uvs) et plus profond lac de Mongolie. Il est situé au nord du pays dans la province d'Hövsgöl. Il mesure 136 km de long et 36 km de large. Ses eaux sont froides, gelées 4 mois par an (de janvier à avril). Le lac Hövsgöl est un des rares très anciens lacs existants, son âge est estimé à plusieurs millions d'années. Situé dans une région sujette à la sécheresse, ce grand lac est considéré comme sacré par les populations locales. Nonante-six cours d'eau se jettent dans le lac mais un seul en sort, l'Egiin Gol. De nombreuses espèces de poissons y vivent ainsi qu'une abondante faune et une flore typique; il est également un point de passage important pour les oiseaux migrateurs depuis la Sibérie. L'immense parc national de Hövsgöl (838 000 hectares) a été créé en 1992 afin de protéger cet environnement.

Pendant que nous attendons que le pompiste daigne se manifester, nous admirons le bétail qui est ramené à l’étable avant la tombée de la nuit.

Les yaks domestiques sont nombreux en Mongolie, mais il sont fréquemment croisés avec des vaches. Ils sont plus massifs et plus forts que les yaks et aussi plus dociles. Ils remplacent notamment le yak aux altitudes inférieures, ce dernier ne pouvant vivre à moins de 3000 mètres d'altitude. Ils vivent également plus longtemps que les yaks: ils peuvent travailler durant 14 ans contre 10 pour les yaks. Ils possèdent un corps trapu, une bosse dorsale entre les épaules et sont recouverts d'une épaisse et longue toison, touchant pratiquement le sol, de couleur brune à noirâtre, qui les protègent des vents violents et des grands froids. Les bouses séchées sont un combustible très utilisé et aussi un engrais. Le croisement d'un yak mâle et d'une vache domestique produit un "podzo" tandis que le croisement d'un taureau domestique et d'une femelle yack produit un "dzo" si c'est un mâle et un "drono" si c'est une femelle.

Le plein des véhicules étant enfin terminé, nous pouvons reprendre rapidement notre route car il va falloir que nous trouvions notre lieu de bivouac avant la tombée de la nuit.

Juste un pont branlant à franchir et nous trouverons l’endroit idéal

Naraa, notre guide et interprète, est un personnage très connu en Mongolie mais aussi en France pour avoir été l’accompagnatrice du parcours initiatique de CORINE SOMBRUN.  En 2001, Corine Sombrun part au nord de la Mongolie, avec Naraa qui est sa guide, pour un reportage pour BBC World Service sur les traditions chamaniques. Le son du tambour utilisé par le chamane Balgir a fait Corine Sombrun accéder à un état de transe qu’elle ne peut contrôler. Balgir lui apprend que, du fait de sa réaction, elle est chamane et qu'elle doit être initiée dans la tradition. Pendant huit ans, elle retourne régulièrement en Mongolie en compagnie de Narra pour suivre l'enseignement d'Enkhetuya, une chamane tsaatan dont la vie est relatée dans le livre « Les Esprits de la steppe ». En 2005, elle se rend au Nouveau-Mexique pour y rencontrer Harlyn Geronimo, medicine man et arrière-petit-fils du guerrier apache. Les conditions de leur rencontre et leurs échanges seront rapportés dans le livre « Sur les pas de Geronimo ». En 2015, parait « Sauver la planète » : le message d'un chef indien d'Amazonie qu'elle signe avec Almir Narayamoga. Il y raconte sa lutte pour la préservation de la forêt amazonienne. Son expérience de la transe et sa capacité à l’induire par la seule volonté intéressent certains scientifiques. Elle collabore depuis 2006 avec Pierre Etevenon, docteur en sciences et directeur de recherches honoraire à l'INSERM, qui a notamment étudié les effets des EMC (états modifiés de conscience) sur les tracés d’EEG. Elle travaille également avec le professeur Pierre Flor-Henry, neuropsychiatre et chercheur à l'Alberta Hospital d'Edmonton, au Canada, dans le but de découvrir les mécanismes physiologiques liés à cet état de conscience volontairement modifié et son influence sur le fonctionnement des hémisphères cérébraux. Les premiers résultats, obtenus par analyses d'EEG sous la direction du professeur Flor-Henry, ont montré que cette transe chamanique modifiait effectivement les circuits du fonctionnement cérébral. Ils sont à l’origine d’un premier protocole de recherche sur la transe chamanique mongole étudiée par les neurosciences.

Cette fois encore le bivouac est installé dans un lieu magnifique pour ne pas dire magique.

Le lendemain, nous reprenons la piste, toujours sous la pluie, pour une autre journée de liaison où nous ne ferons que quelques rares rencontres.

La Mongolie est très peu peuplée puisque c’est le pays qui a la plus faible densité de population au monde avec 1,7 hab/km. Son territoire est immense mais possède très peu de terres arables, le pays étant montagneux et couvert de steppes dont l'aridité croît en allant vers le sud (désert de Gobi). Près de 30 % des 2,8 millions d’habitants sont nomades ou semi-nomades.

Enfin à l’apparition de ces nouveaux autels chamaniques, le temps semble se lever. C’est de bon augure puisque nous arrivons dans la région où nous devons rencontrer notre premier chamane.

En contrebas du col nous apercevons un lac où, selon les informations de notre chauffeur qui connaît parfaitement la région et ses habitants, réside un chamane « très puissant » qui n’est pas prévu au programme de nos rencontres. Naraa nous demande si nous sommes d’accord de le rencontrer. C’est évidemment à l’unanimité que nous acceptons cette opportunité inattendue que nous interprétons comme une synchronicité à ne certainement pas refuser.

Le groupe s’approche à pied de la maison du chamane, car les véhicules nous ont déposés après le col pour pouvoir progresser plus librement sur la piste extrêmement glissante et quasiment impraticable avec des passagers à bord.

La maison du chamane se niche au pied d’une colline, au bord d’un lac splendide, à l’image de ceux que l’on peut trouver dans les Alpes. Mais ici aucune construction et aucune pollution ne vient gâcher l’atmosphère et le paysage. Le chamane vit ici en étroite relation avec la nature et, comme il nous le dira lors de nos entretiens, se ressource et alimente ses pouvoirs « avec l’aide de l’esprit du lac ».

La réalité des esprits ?
Les esprits sont comme des forces transpersonnelles en mouvement que nous expérimentons en nous, ou à travers nous, mais qui ne sont pas uniquement animées par nous. Richard Nol, l’Anthologie du chamanisme de S Nicholson

Les chamans sont en relation avec un royaume où les esprits apportent aide et sagesse mais les esprits sont-ils des projections de l’inconscient du chaman ou, au contraire, ont-ils une réalité objective? Le débat est lancé!

Naraa ayant expliqué l’objectif exploratoire de notre voyage, le chamane nous invite, comme le veut l’hospitalité mongole, à partager le thé et le yaourt en compagnie de sa famille. Ce sera l’occasion de pouvoir lui poser de nombreuses questions auxquelles il répondra sereinement et humblement. Une relation particulièrement riche en enseignements pour le groupe s’étant établie spontanément entre le chamane et une des participantes, nous décidons de modifier notre programme initial et de planter le bivouac au bord du lac pour la nuit afin de poursuivre plus longuement cette rencontre forte et tellement inattendue.

Pierre avec l’aide de Françoise et de Martine s’active à ramasser du bois, pour se monter, pendant tout le voyage, véritable gardien du feu.

Le camp installé, nous pouvons savourer la douceur des lieux.

Chacun peut vaquer librement à ses occupations et Pauline s’adonne avec talent au dessin sur son carnet de voyage et ne manque pas d’initier à son art ses nouveaux amis.

Quant à nos chauffeurs, ils nous prouvent que le marteau, le tournevis, le fils de fer et le chatterton sont bien les outils suffisants qui permettent aux deux vieux 4 × 4 russes déglingués de tourner comme des horloges chaque matin.

La nuit sera bonne et douce sur ce magnifique lieu de campement.

La brume se lève sur le camp. Aujourd’hui, une très belle journée ensoleillée s’annonce.

Après le petit déjeuner, notre groupe se dirige à pied vers la cabane du chamane pour une série de rencontres individuelles dont Naraa se fera l’interprète.

Plusieurs membres de notre groupe souhaiteront rencontrer le chamane. Et pendant le temps de la « consultation » chacun patientera le plus agréablement qu’il le peut.

Les différents « entretiens » terminés, nous pouvons prendre congé de nos hôtes. Le chamane redevient un homme simple comme les autres dès qu’il a quitté sa fonction.

Le principal rôle social d’un chaman est celui de médiateur, de triple intermédiaire entre le groupe dont il est responsable, les habitants du monde spirituel et la nature. Le sens profond de la médiation est d’établir et de maintenir un équilibre, essentiellement pour soigner les malades et soulager les tensions à l’intérieur du groupe, ce qui ne peut être accompli que si les trois sphères sont en harmonie.

Nous entreprenons une très belle randonnée qui doit nous mener à la vallée adjacente où réside le prochain chamane que nous devons rencontrer.

Une petite erreur d’itinéraire nous oblige à franchir une rivière ce qui est loin d’être désagréable vu la température très clémente.

Après avoir longé le lac, nous commençons l’ascension en pente douce vers le col.

Le col est clairement identifiable grâce à l’autel chamanique qui le couronne.

La structure de l’univers chamanique La structure de l’univers chamanique est toujours conçue d’une manière très semblable quel que soit le lieu où l’époque. Ainsi l’univers serait formé de trois niveaux cosmiques – le ciel, la terre et le monde inférieur – souvent appelé « monde du haut », « monde du milieu », « monde du bas », reliés entre eux par un axe central grâce auquel le chaman peut communiquer avec chacune des régions. Le chaman expérimente le mystère de la rupture des niveaux et son savoir et sa technique concerne les façons de se déplacer d’une région à une autre. Carl Gustav Jung a comparé l’esprit humain à une vaste maison à étages, dont chacun contenait plusieurs potentialités. Il a montré que la plupart des gens de l’époque moderne ne vivent que sur un ou deux étages, oubliant le reste « Avec cette maison merveilleuse, espacée d’étages que nous appelons l’esprit humain, il semble que nous devrions nous tourner vers les chamans pour qu’ils nous aident, avant qu’il ne soit trop tard, à retrouver ce que nous avons perdu au sujet de l’âme humaine. » C.G.Jung Dans l’apprentissage chamanique, par les rituels, les épreuves, la gestion de substances psycho actives, la prière, la méditation, le jeûne et les conseils des maîtres dans ce monde et dans l’autre, tous les étages de l’esprit sont explorés. Ce qui peut sembler être de la folie pour quelqu’un d’extérieur est simplement pour le chaman une déambulation dans l’esprit multidimensionnel. »
Textes extraits de l’anthologie du chamanisme. S. Nicholson

Les trois zones cosmiques et le pilier du monde Les trois grandes régions cosmiques, peuvent être traversées successivement par le chaman parce qu’elles sont reliées par un axe central. Cet axe passe, par une ouverture représenté dans la réalité par une ouverture ou un trou (souvent décrit comme un pilier de tente, une faille, une grotte, etc…) par lequel l’âme du chaman en extase peut s’envoler ou descendre lors de ses voyages célestes ou infernaux et effectuer son voyage entre les mondes et c’est par cet axe que les dieux descendent sur la terre et les morts dans les régions souterraines. Textes extraits de l’anthologie du chamanisme. S. Nicholson

Le symbolisme du centre Le symbolisme du centre est fréquent aussi bien dans les cultures archaïques « primitives » que dans toutes les grandes civilisations orientales. En effet les palais, les villes royales et même les simples habitations étaient censées se trouver au centre du monde, sur le sommet de la montagne cosmique. Le sens profond de ce symbolisme est que dans le centre est possible la rupture des niveaux, c’est-à-dire la communication avec le ciel. Cet axe du monde, symbolise pour le chaman l’endroit où se manifeste l’espace et le temps sacré. Textes extraits de l’anthologie du chamanisme. S. Nicholson

Le chaman est un spécialiste de la communication rituelle Le chaman est avant tout un personnage de liaison, un médiateur qui jette un pont entre les forces et les éléments des trois mondes de l’univers. L’état de conscience chamanique correspond à l’état mystique où l’on entre en harmonie avec le «  grand ordre unifié des choses » ; ainsi le chaman « évolue dans la structure de l’univers » et communique avec toute la nature, y compris avec les animaux et les esprits. Dans cette vision de la réalité où tout est en connexion à un niveau très élevé, cela confère au chaman la capacité d’en tirer un pouvoir bien plus puissant que lui-même et de restaurer l’harmonie grâce à son intervention symbolique entre les dimensions de réalité ordinaire et non ordinaire. Textes extraits de l’anthologie du chamanisme. S. Nicholson

Nous basculons vers une magnifique vallée très dégagée.

Une rencontre avec un berger nous permet de nous renseigner sur la distance qui nous reste à couvrir pour rejoindre la maison du prochain chamane.

Les 4X4 sont bien au rendez-vous prévu. Ils nous permettront de traverser la rivière qui est trop haute et trop forte pour être franchie à pied à cause des pluies des jours précédents.

Pendant que nous marchions, l’équipe logistique a eu tout le temps de nous installer au bord d’une rivière. Nous passerons quatre nuits dans ce campement très agréable.

Ce matin nous partons, pour une marche de quelques heures, sur une piste qui va nous conduire au village le plus proche, afin que nous puissions y faire nos emplettes pour les offrandes qui seront nécessaires pour la cérémonie chamanique qui est prévue pour demain.

Nous profitons de cette étape pour effectuer une marche en silence afin que chacun puisse méditer en marchant et interroger la nature.

Nous approchons du village et de ses maisons magnifiquement colorées

La patine des toits, des clôtures et des peintures murales, n’a rien à envier à certains tableaux d’art contemporain.

La peinture vive des toits et des façades permet aux habitants de rompre la monotonie du paysage et d’égayer les interminables hivers mongols.

À l’entrée du village, Naraa nous traduit des inscriptions en langue mongole traditionnelle.

L’épicerie du village est bien approvisionnée et nous y trouverons tout ce que nous avons besoin pour le rituel de demain. Espérons que les esprits repus nous seront favorables demain.

Les esprits des forces transpersonnelles?

Dans toutes les cultures chamaniques, on décrit les esprits comme étant des forces transpersonnelles qui animent ou traversent le chaman mais qui échappent presque toujours à notre contrôle. Il y a des choses dans la psyché que je n’engendre pas, mais qui se produisent d’elles-mêmes et qui ont leur propre vie. C.G.Jung

Ces forces (le plus souvent) personnifiées sont des entités autonomes possédant leur propre autonomie. À l’état de veille ordinaire, le chaman ne peut généralement pas les contacter ni les faire travailler alors qu’en état de conscience chamanique, il peut les voir distinctement. Les chamanes « ne voient pas ces phénomènes ordinaires comme issus de leur mental dans le sens où ils seraient perçus comme une projection de leur propre esprit, mais le cerveau est plutôt utilisé pour avoir accès à une porte afin d’entrer dans une autre réalité existant indépendamment de ce cerveau. L’univers chamanique dépasse de ce fait le simple « contenu » du cerveau humain Pour de nombreux chamans la partie majeure de l’initiation consiste à entrer en contact avec les esprits adéquats, c’est-à-dire avec ceux qui deviendront les esprits protecteurs.

Textes extraits de l’anthologie du chamanisme. S. Nicholson

Nous profitons de la proximité du lac pour aller nous baigner et faire une toilette complète malgré la fraicheur de l’eau.

Une partie du groupe rentrera en camionnette mais les plus courageux referont le chemin du retour à pied.

Le bivouac sera atteint par les marcheurs, juste avant la tombée de la nuit.

Ce matin nous nous préparons à rejoindre la montagne ou le chamane nous attend pour un rituel.

La température est idéale pour la randonnée mais il ne faut pas oublier de se protéger du soleil car l’indice d’UV est très élevé malgré les nuages.

L’autel où le chamane nous attend se situe à la lisière de la forêt, près du sommet de la montagne.

La progression est assez pénible sur cette portion de steppe parsemée de monticules spongieux, entre lesquels circulent de minuscules ruisseaux.

Néanmoins, sortis de ce passage délicat, la pente pour arriver jusqu’au lieu de la cérémonie est confortable et la température idéale.

Le chamane est déjà arrivé car il a préféré venir en camionnette 4 × 4, avec notre chauffeur, pour préparer sa cérémonie.

Qu’est-ce qu’un chaman?

Défiant le temps et les différences culturelles, la tradition chamanique est toujours bien vivante et étonnamment identique à elle-même en ce qui concerne ses représentations du monde et ses méthodes, mais au fait, qu’est-ce qu’un chaman ? Le mot » chaman » dérive du mot russo-toungouse «Shaman » (les « Toungouses »  sont différents peuples de la Sibérie) pour qualifier des gens qui ont joué et jouent toujours un rôle unique dans presque toutes les cultures du monde. Les chamans sont des hommes et des femmes qui affirment pouvoir changer volontairement leur état de conscience, pour communiquer avec les différentes forces de la nature et de l’univers, vivant ainsi à des expériences inhabituelles qui les rendent capables d’obtenir des informations(nous verrons plus loin que cette capacité de rechercher des informations est essentielle pour comprendre le lien qui existe entre le chamanisme et la psychanalyse transgénérationnelle) leur permettant de guérir les membres de leur tribu et d’améliorer la cohésion et la condition de leur groupe social. L’une des erreurs les plus fréquentes que l’on fait à propos du chamanisme est de le considérer comme un genre de comportement humain rare, exotique, voire même dangereux : une anomalie archaïque, un vestige des origines secrètes de notre vie sacrée, alors que chamanisme partage certaines particularités essentielles avec les traditions immémoriales qui jalonnent l’histoire, et qui sont apparues dans toutes les sociétés établies, la société occidentale y compris. Le chamanisme est donc habituellement perçu, dans les sociétés tenant du siècle des lumières, comme une bizarrerie qui existerait dans un espace « magique » hors du temps, dans un plan d’expérience qui n’est ordinairement pas accessible à un individu « civilisé et psychologiquement normalement équilibré » et pourtant forcé de constater que dans chaque culture nous trouvons des mythes qui rendent compte de rencontres entre des humains et des entités singulières, qu’on les appelle esprit, Dieu, déités, anges, démons, fantômes, apparitions, etc.

Textes extraits de l’anthologie du chamanisme. S. Nicholson

En synthèse nous pouvons dire que le chaman est quelqu’un qui travaille et collabore avec les « esprits », dans des états de conscience modifiés, afin d’accumuler des pouvoirs intérieurs pour maîtriser des événements dans un but thérapeutique et/ou social. Reste donc, pour rassurer notre rationalité, à définir ce que sont les « esprits » car n’y a aucun modèle existant actuellement psychologie classique pour rendre compte de cette notion. 

Pauline et Naraa préparent consciencieusement nos futures offrandes aux « esprits ».

Nous suivons avec beaucoup d’intérêt tout le processus du rituel.

Le petit-fils du chamane accompagne son grand-père et participe lui aussi activement au rituel. Mais il n’est pas encore dit qu’il prendra automatiquement la relève de son grand-père car pour cela il faut qu’il soit appelé par les « esprits ».

Comment devient-on chamane? Tout le monde ne peut pas devenir chamane, il faut être appelé pour cela par les esprits et surtout, tout le monde (y compris certains appelés) ne veut pas devenir chamane, car les exigences de la voie chamanique peuvent être très dures et désagréables et sont parfois/souvent vécues comme une malédiction par l’élu, mais aussi par sa famille. Souvent dès sa prime enfance, le futur chamane diffère de ses pairs par certains aspects généraux.et les esprits reconnaissent souvent le futur chamane dans sa jeunesse. Aujourd’hui les chamanes trouvent leur voie de différentes façons : par transmission héréditaire, en guérissant d’une maladie infligée par les esprits, durant une quête de vision ou au cours d’un rêve initiatique.

La transmission héréditaire

Quoi que la vocation soit involontaire et spontanée elle est souvent quasi héréditaire, en ce sens que la transmission des pouvoirs chamaniques se déroule souvent à l’intérieur d’une famille et non pas pour un individu déterminé. Une maladie initiatique infligée par les esprits

Le futur chamane peut recevoir l’appel par l’intermédiaire d’une maladie qui peut amener l’élu au bord de la mort et donc au seuil du monde des esprits. Le chaman éprouve une vocation spontanée au cours de laquelle il est affligé d’esprits qui prennent possession de lui et le forcent à la solitude exigeant qu’il devienne chaman. Cet état altéré de conscience non désirée qui assaille les futurs chamans est appelée possession démente. C’est pour cette raison que l’on entend parfois dire « qu’il faut avoir été foudroyé avant de devenir chamane ».

L’appel durant une quête de vision ou à travers un rêve

La « quête de vision » volontaire est un trait dominant d’un certain chamanisme nord-américain. Il s’agit d’une épreuve extrême, un rite de passage, indispensable à tout futur chamane. Ce voyage intérieur a pour objectif d’ouvrir l’aspirant à un autre mode de perception et demande du courage car il est souvent douloureux puisque qu’il comporte plusieurs éléments qui peuvent être pénibles : la séparation de son milieu habituel, l’isolement, le jeûne, l’absorption de certaines substances hallucinogènes, etc. L'initié apprend à voir autrement, à observer les signes et les présages que la nature lui adresse et à découvrir les secrets et les mystères que recèle son âme et d’acquérir certains pouvoirs. Pour mieux saisir le sens de la quête de vision, pratiquée à l'origine par les peuples autochtones d'Amérique du Nord, il importe de comprendre les fondements de leur spiritualité. Pour eux, le divin se manifeste dans toutes les créatures de la terre. Il n'y a pas de hiérarchie entre les espèces vivantes ni de séparation entre la vie sur terre et dans l'au-delà. Cette constante interaction entre les différentes espèces, toutes animées d'une âme, que le futur chamane reçoit ses réponses ou ses inspirations sous forme de visions et de rêves. Le rêve fait aussi partie intégrante du chamanisme. Les chamanes appellent les esprits en rêve et reçoivent aussi leur pouvoir et les informations nécessaires à la guérison de leurs « patients » par ce canal. Pour les amérindiens une invention n'est pas le fruit du génie créateur humain, mais un don insufflé à l'inventeur par un esprit extérieur. Cette notion d’une information qui serait donnée par un esprit extérieur pour solutionner une problématique ou guérir d’une maladie est très importante à retenir pour la compréhension du lien que nous explorons entre le chamanisme et la psychanalyse transgénérationnelle.

Une sorte de fatalité qui ne se refuse pas

Il est difficile de refuser quand on se sent désigné. Souvent les appelés tentent d’ignorer la convocation des esprits mais finissent généralement par devoir capituler (c’est souvent le cas lorsqu’ils finissent par établir une relation de cause à effet entre le refus de leur appel chamanique est une accumulation de malheurs divers), car plupart des traditions chamaniques stipulent que refuser d’obéir aux notifications d’un esprit entraîne maladie, la folie et même la mort.

Textes extraits de l’Anthologie du chamanisme. S.Nicholson

La très belle cérémonie terminée, nous redescendons vers le camp pour nous reposer, car ce soir nous assisterons à une autre cérémonie qui durera toute la nuit.

L’après-midi se déroule de façon paisible pour tous car nous gardons nos forces, avec un peu d’appréhension, pour le rituel de ce soir.

Les chiens de prairie viennent nous rendre visite comme pour nous distraire et s’habituent rapidement à notre voisinage bienveillant.

La nuit venue nous rejoignons la maison du chamane pour la cérémonie qui débutera à 10 heures ce soir et durera la nuit entière.

En Mongolie, le profane de la vie quotidienne cohabite sans problème avec le monde chamanique. Pendant que son grand-père se prépare pour la cérémonie, le petit-fils, comme beaucoup d’enfants dans le monde, regarde la télévision pendant que la famille vaque à ses tâches habituelles.

La cérémonie commence par la préparation du tambour chamanique qui est soigneusement chauffé sur le poêle par les fils du chamane qui, malgré leur jeunesse et leur belle stature doivent se relayer pour cette tâche car le tambour des chamanes mongols pèse plusieurs kilos. Le poids du tambour rendra d’autant plus surprenant la capacité du chamane à l’utiliser, sans interruption, pendant plusieurs heures lors de la cérémonie.

Le tambour chamanique

Dans la majeure partie du monde on utilise des percussions pour arriver à l’état de conscience chamanique mais il existe d’autres techniques notamment la prise de drogues hallucinogènes comme par exemple haute Amazonie le son du tambour est un son très monotone, très régulier comportant un nombre spécifique de battements à la minute, et qui produit normalement par des tambours ou d’autres instruments à percussion. Il a pour effet remarquable d’engendrer une rapide transformation vers un autre état de conscience ; mais en toute sécurité. Lorsqu’on voyage sous l’effet du seul son du tambour on peut se souvenir de tout ce qui arrive, car il n’y a pas d’amnésie, pas d’effets physiques secondaires, et on peut contrôler à son gré la durée du voyage, ce qui n’est pas le cas avec les hallucinogènes. Grâce au tambour, on franchit pour ainsi dire une porte différente, selon une technique étonnamment efficace. Le tambour ajuste le cerveau sur des longueurs d’onde identique à celles correspondant aux états altérés en états de conscience chamanique. Par exemple, on a découvert que le tambour en peau de cerf utilisé chamaniquement par les Indiens de la côte de l’Ouest du Canada émettait une fréquence de quatre à sept cycles par seconde, et cela correspond aux autres états de l’électroencéphalogramme. Une coïncidence plutôt intéressante. Anthologie du chamanisme : textes réunis par S. Nicholson.

Il allait de soi que nous ne prendrions pas de photos pendant cette cérémonie. Pour le voyage en état de conscience modifié, le chamane a revêtu son impressionnant costume traditionnel, tel que celui-ci que nous avons photographié lors de notre visite au musée d’Oulan-Bator à la fin de notre voyage.

 Lorsqu’un chaman endosse la peau de son pouvoir animal et se met à danser autour du feu de camp, c’est le pouvoir animal qui danse en état de conscience chamanique, non l’homme et une peau d’animal dans une interprétation vaguement théâtrale. Anthologie du chamanisme : textes réunis par S. Nicholson.

Pendant toute la nuit nous suivrons une cérémonie extrêmement étrange et impressionnante. La performance physique du chamane est étonnante. Ce petit homme âgé d’environ 60 ans, aidé de son tambour et protégé par son costume-armure, va dialoguer pendant plusieurs heures avec les « esprits ». Il tombera plusieurs fois dans une sorte de coma et sera réanimé, par ses assistants, à l’aide de fumigations de plantes. En tant qu’observateur et ayant quelques notions de physiologie de l’effort, je peux affirmer qu’il est impossible de fournir un tel effort physique, pendant de longues heures, dans un niveau et un état de conscience ordinaire. Quelque chose de très surprenant s’est joué cette nuit-là sur le plan énergétique et ce qui nous a tous étonnés, est l’état de fraîcheur du chamane à la fin de sa prestation. Nous l’avons tous, trouvé plus reposé et plus en forme que pendant la journée. Lorsque nous l’interrogerons, à la suite de la cérémonie, il nous dira : « Je n’ai rien fait, ce sont les esprits qui ont travaillés ». Très surprenant!

Les états de conscience du chaman

 L’une des principales caractéristiques des chamanes est leur familiarité avec des réalités autres que la réalité à quatre dimensions d’espace et de temps que nous connaissons en état de conscience éveillée ordinaire. Le chaman possède la faculté d’auto orchestrer ses différents états de conscience qui lui permettent de servir de pont entre la réalité ordinaire et les plans transpersonnels. Il faut cependant distinguer ces états altérés de conscience (induit par le tambour, le chant, le jeune, la régulation thermique, la privation sensorielle ou les substances psychédéliques), appelé état de conscience chamanique E CC, des états altérés de conscience étudiée en psychologie.

Notre état « ordinaire » de conscience ne serait qu’une illusion.

Les jivaros d’Amérique du Sud disent que la seule réalité est celle accessible en état de conscience chamanique, et que notre état ordinaire de conscience n’est qu’une illusion, un « mensonge ». Ils soutiennent qu’un événement significatif dans notre monde est le résultat d’événements cachés dans l’autre dimension. Le rôle du chamane est d’intervenir dans cette autre dimension pour obtenir un effet dans notre dimension, appelée « réalité consensuelle ».
Un voyageur qui accède à une réalité altérée. Les chamanes entrent dans cet état de conscience chamanique (ECC), afin d’effectuer des voyages dans les mondes inférieurs et supérieurs. Ces autres mondes accessibles aux chamanes sont considérés comme une réalité altérée, et l’objectif est d’interagir consciemment sur certains pouvoirs ou esprits gardiens (souvent des pouvoirs animaux dans le monde du bas). Le chamane sollicite l’amitié et l’aide de ces pouvoirs animaux afin de secourir par divers moyens d’autres personnes. Dans cette réalité cachée, il (ou elle) peut également appeler des maîtres spirituels pour lui donner des conseils, des instructions et d’autres formes d’assistance. » L’état de conscience chamanique devrait être accessible à tous les êtres humains. Notre dépendance vis-à-vis de la pensée consciente logique et rationnelle nous coupe de l’état de conscience chamanique qui devrait être accessibles à tous les êtres humains. Quand le chaman opère une guérison dans l’état de conscience chamanique, il utilise des ressources mentales auxquelles les hommes du monde moderne, non plus accès, ou auxquelles ils ne s’intéressent pas à cause de leur dépendance vis-à-vis de la pensée consciente logique et rationnelle. Devant des problèmes difficiles à résoudre, le chaman a recours à des expériences intérieures plutôt qu’à la raison. Utilisant des souvenirs sensoriels ainsi que des abstractions et des symboles, « il passe en revue le flot d’images de son subconscient sans faire appel aux pouvoirs critiques de la conscience, ni aux repaires de causalité, d’espace et de temps ». Ainsi le chaman, se raccorde une banque de données qui n’est pas accessible en état de conscience ordinaire. Ne pas avoir pris en compte la distinction qu’il y a entre états de conscience chamanique état de conscience éveillée ordinaire, de même que les définitions qu’impliquent ces états, a conduit à des conclusions erronées sur la guérison chamanique.

Quitter l’état de veille et les ondes de bêta Le rythme bêta ou onde bêta est un rythme cérébral que l'on peut mesurer par électro-encéphalographie. Le rythme bêta est caractéristique de l'état d'éveil normal conscient. Puisque les chamans opèrent leur guérison dans un état différent de l’état de veille, où le cerveau est en ondes bêtas, ils doivent avant tout adopter des moyens efficaces pour échapper à ces conditions. Tout ce qui sert à altérer la conscience peut donc faire partie d’un rituel chamanique ou d’un autre–surtout les techniques destinées à l’Hypo et à l’hyper stimulation des différents systèmes sensoriels comme les conditions de température extrême (Sweet Lodge amérindiennes *), les privations physiques et sensorielles, l’usage de plantes hallucinogènes, les auxiliaire auditifs des états altérés (tambours), etc. Anthologie du chamanisme : textes réunis par S. Nicholson.

Nous nous sommes couchés à l’aube, tous biens secoués par cette expérience exceptionnelle. Pour nous réconforter l’équipe a prévu de nous confectionner un plat typiquement mongol avec du mouton qui sera cuit avec des pierres chaudes à l’intérieur de la casserole.

Cette recette est un véritable régal.

Après les émotions de cette nuit, l’ambiance est plutôt à la détente pour l’équipe logistique et notre Naraa.

Mais pour d’autres, le besoin d’une marche, comme outil d’intégration des multiples informations qui se sont accumulées ces derniers jours et particulièrement cette nuit, se fait impérativement sentir.

Ce soir, une fois de plus, Pierre veillera avec attention sur le feu autour duquel nous nous réussissons pour tenter de mettre des mots sur la curieuse expérience de la nuit précédente.

Le jour se lève et nous recevons la visite des yacks qui traversent la rivière pour changer de pâturages.

Ce matin nous nous rendons pour la dernière fois au village près du lac, pour rencontrer un très vieux chamane.

Malgré son grand âge, le vieil homme continue à pratiquer et forme actuellement un assistant. Quand nous pénétrons dans la maison un jeune couple consulte .Une fois de plus nous constatons que le chamanisme ici en Mongolie fait partie de la vie quotidienne et se pratique sans chichi et sans décorum particulier.

Le vieil homme est impressionnant de bonté et de bienveillance. Il nous prend chacun dans ses bras pour nous saluer et nous sommes tous frappés par la qualité et l’intensité particulière de son regard qui semble sonder l’âme de celui ou de celle qu’il regarde fixement mais avec une infinie douceur.

Le chaman est capable, les yeux fermés, de sonder les ténèbres et de percevoir les choses et les événements à venir qui restent cachés aux yeux des autres. Non seulement il peut voir les choses lointaines, mais il peut aussi retrouver les âmes, les âmes volées qui sont retenues dans d’étranges contrées ou qui ont été emmenées au pays de la mort. Anthologie du chamanisme : textes réunis par S. Nicholson.

Certains d’entre nous auront la possibilité de s’entretenir en privé avec le chamane. Mais malheureusement le temps presse et nous devrons partir, car dans deux jours nous devons absolument être à l’aéroport de Mörön pour prendre un vol qui nous ramènera à Oulan-Bator.

Sur la route du retour nous longeons le lac au bord duquel habite le premier chamane que nous avons rencontré.

Naraa et ses chauffeurs décident d’emprunter un bac qui nous fera gagner 75 km de piste.

Le propriétaire a construit le bac de ses propres mains et le propulse à la force de ses bras, heureusement souvent aidé par les passagers les plus courageux.

L’attention de notre chauffeur est permanente sur la piste chaotique. Les pluies ont creusé des ornières très profondes dans la taïga et même les petits 4 × 4 russes, si agiles habituellement, peinent à se frayer un chemin dans la boue collante.

Au loin se profile une chaîne montagneuse que nous allons devoir traverser avant de rejoindre le lac Khövsgöl.

Mais avant cela nous allons devoir rouler dans le lit d’une rivière où il est possible de s’enliser dans des bancs de sable.

La journée va s’achever et il est temps de trouver un endroit propice pour monter le camp.

Le choix s’avère absolument magnifique.

Pierre veillera à ce que nous ne manquions pas de bois pour le feu.

En ce qui me concerne il s’agit certainement, de l’un des plus beaux campements de mon existence.

Il fait frais ce matin et le feu a été relancé pour le plaisir de tous.

Nous reprenons la piste pour franchir la chaîne montagneuse qui ressemble parfois, à certains endroits, aux Alpes ou à la Corse.

Avoir un copilote attentif aux pièges de la piste n’est pas du luxe pour le chauffeur toujours aussi concentré.

Les crânes d’animaux nous deviennent maintenant familiers au sommet de chaque col.

Nous nous approchons de plus en plus du lac au bord duquel nous devons passer cette deuxième nuit de liaisons, mais le chemin est particulièrement boueux et glissant et les petits 4 X 4 avancent quasiment au pas d’homme. Heureusement qu’il ne pleut pas car nous n’aurions pas pu passer par cette piste.

Le lac Khövsgöl est le deuxième plus grand et le plus profond lac de Mongolie. Il est situé au nord du pays, dans la province d'Hövsgöl. Il mesure 136 km de long et 36 km de large. Ses eaux sont froides, gelées 4 mois par an.

Après une journée éreintante pour le dos et pour la nuque, nous rejoignons notre campement au bord du lac, mais la nuit sera réparatrice et agréable dans nos yourtes bien douillettes

Aujourd’hui il ne faut pas traîner car nous devons absolument arriver à l’aéroport avant 16 heures

Une dernière péripétie met un peu de piment dans cette liaison ; un des deux véhicules est tombé en panne de carburant sur le goudron qui nous mène à l’aéroport. Nous décidons de jouer la carte de la sécurité et de transférer tout le groupe à l’intérieur d’un seul véhicule dans lequel le reste de l’essence sera siphonnée.

Tout est bien qui finit bien et nous sommes à l’heure. Il nous reste juste le temps pour répartir le matériel dans nos sacs, car le poids est scrupuleusement limité à 15 kg pour ce vol intérieur.

Au décollage nous pouvons admirer une dernière fois « la structure urbanistique » de Möron dont les « lotissements » s’étendent de plus en plus

Retour à Oulan-Bator, où dans les faubourgs, les bidonvilles de yourtes cohabitent avec les barres d’immeubles de la période soviétique.

Quant au centre-ville il s’étoffe de plus en plus de buildings modernes à l’architecture souvent très réussie

Après une nuit à Oulan-Bator, nous débutons la dernière partie du voyage pour nous rendre dans le parc naturel de Gorkhi-Terelj qui se situe environ à deux heures de route de la capitale. Le parc national de Gorkhi-Terelj qui signifie en mongol "ruisseau - rhododendron" est situé à environ 70 km à l'est de la capitale et se situe dans la zone protégée des Monts Khentii.

Pendant les deux jours qui vont suivre nous allons cohabiter avec Gerlee, une jeune chamane que Naraa a invité à nous accompagner pour que nous puissions échanger sur sa pratique.

Nous nous installons dans des yourtes confortables qui nous serviront à la fois de dortoir, de salle de séminaire et de lieu de cérémonie.

Le parc naturel est splendide et nous en profitons pour effectuer une magnifique balade avant la cérémonie du soir à laquelle la chamane nous a tous conviés.

Ce séjour de deux jours sera très intense pour les participants. Nous aurons l’occasion de beaucoup échanger avec la jeune chamane Gerlee, qui dit tenir son pouvoir de sa grand-mère décédée qui lui sert « d’esprit ».

L’apprentissage chamanique  L’apprentissage des futurs chamanes varie d’un endroit du monde à l’autre et se prolonge généralement plusieurs années. La transmission de la tradition culturelle et de certains conseils pratiques par les maîtres chamanes représentent, dans de nombreuses cultures, un aspect indispensable de l’initiation. Cependant, on admet de manière presque universelle que les plus grands enseignements sont dispensés par les guides spirituels. »

Esprits gardiens et guides spirituels  Dans le chamanisme sibérien, le novice reçoit son savoir des esprits. Ainsi, lors des premiers contacts, les esprits fonctionnent avant tout comme des maîtres spirituels. L’esprit gardien, rencontré dans ses visions initiatiques, prend souvent la forme d’un « animal de pouvoir » et le novice y fait appel (qu’il ait une forme humaine ou animale) pour être protège lorsqu’il entre dans des états altérés de conscience potentiellement dangereux (l’état de conscience chamanique « ECC ») et lorsqu’il voyage en transe dans le monde supérieur et inférieur. Cet esprit l’introduit aussi auprès des esprits « tutélaires » à qui il peut demander de l’aide lors des séances de guérison et de divination. Ces esprits tutélaires sont indispensables au travail du chamane ; sans eux, le chaman ne peut rien entreprendre. Il arrive parfois que les guides spirituels soient des ancêtres. Anthologie du chamanisme : textes réunis par S. Nicholson.

Une fois de plus, cette expérience sera très intense pour l’ensemble du groupe. A la suite de cette cérémonie collective, chaque participant pourra aborder le lendemain des questions beaucoup plus personnelles lors d’un entretien individuel avec la jeune chamane. Nous aurons tous l’impression de vivre en dehors de l’espace et du temps habituel.

Santé et maladie dans le système chamanique D'après Alessandro Jodorowski, la maladie peut être comprise comme un manque de beauté de conscience, et que guérir consiste à devenir authentiquement soi.

 Dans les traditions chamaniques, échapper à la mort n’est pas nécessairement le but des pratiques de la médecine. Notre défiance en Occident à l’égard de ces systèmes provient en grande partie du faite que la guérison chamanique n’a pas toujours pour résultat la prolongation de la vie. En effet, guérir pour les chamans est une affaire spirituelle. La maladie a son origine et acquiert sa signification dans le monde des esprits. Et perdre son âme est l’événement le plus grave, puisque cela ôte toute signification à la vie, présente et future. Ainsi, la guérison chamanique consiste à nourrir, à préserver, et empêcher l’âme d’errer pour l’éternité.

Anthologie du chamanisme : textes réunis par S. Nicholson.

La maladie telle qu’on la conçoit au sens moderne est considéré comme quelque chose qui entre dans le corps en provenance de l’extérieur ; quelque chose qui a besoin d’être retirée ou détruite ou contre lequel il faut se protéger. Dans le système chamanique au contraire, le problème essentiel ne concerne pas un élément extérieur, mais la perte d’un pouvoir personnel, laquelle permet ensuite une intrusion–qu’il s’agisse d’une flèche ou d’un esprit malfaisant. De ce fait, ceci correspond à une manière de penser d’avant-garde, puisque de récentes découvertes en médecine s’appuient sur une description du processus de la maladie en des termes similaires. Pour les résumer en un mot, ce qu’on appelle les causes externes à l’origine des principales maladies – les virus, bactéries, et autres éléments invisibles de l’environnement – ne représentent une menace pour la santé que lorsque les protections naturelles d’un individu laissent paraître une faiblesse. L’univers et tous ses habitants faisant partie d’un seul ensemble, le chaman s’évertue à maintenir une communication parmi les animaux, les végétaux, les minéraux et les étoiles. »

Anthologie du chamanisme : textes réunis par S. Nicholson.

Les méthodes de guérison chamanique La guérison chamanique s’effectue essentiellement de deux manières. Elle implique soit d’introduire quelque chose qui manque à la personne malade, soit au contraire d’extraire ce qui n’appartient pas à son corps. Cette seconde forme de guérison – qui est habituellement employé pour une maladie locale – ne comprend pas de voyage chamanique. Elle suppose de travailler ici, dans le monde intermédiaire, en utilisant des techniques divinatoires et en passant de la réalité ordinaire à la réalité non- ordinaire, afin de visionner la maladie et de l’expulser par divers moyens. L’autre méthode qui consiste à restituer quelque chose de perdu ou de manquant, nécessite au contraire un voyage chamanique. Il s’agira par exemple de la restauration de l’âme vitale d’un individu, en particulier dans le cas où ce celui-ci se trouve au seuil de la mort, ou au bord du suicide. Dans un tel cas, le chaman partira dans l’autre monde à la recherche de l’âme perdue, la retrouvera, puis la rendra à l’individu.Par son rôle d’intermédiaire, le chaman restaure l’harmonie, c’est-à-dire qu’il préserve un équilibre chamanique de relations de pouvoir à l’intérieur de sa communauté et dans les mondes extérieurs grâce à son intervention symbolique entre les dimensions de réalité ordinaire et non ordinaire, le chaman médiateur apparaît comme un spécialiste de la communication rituelle et du maintien de l’équilibre social–psychologique.

Anthologie du chamanisme : textes réunis par S. Nicholson.

Une réintégration Psycho-Physique  Les expériences initiatiques et visionnaires du chaman, ainsi que les méthodes pratiques employées pour les susciter, sont considérées par beaucoup comme une solution possible à la réintégration psycho physique ; de la même façon, la conception du monde chamanique semble représenter aujourd’hui un éventuel point de départ dans le rétablissement d’une relation harmonieuse (que nous avons perdu) avec la nature et la terre. Anthologie du chamanisme : textes réunis par S. Nicholson.

Les méthodes de diagnostic et de soins sont identiques dans toutes les sociétés chamaniques Les chemins qui passent par les lucarnes de la conscience sont les mêmes d’une culture à l’autre, quelle que soit dans la réalité ordinaire, le lieu et le moyen utilisé pour entreprendre le voyage chamanique. Les méthodes de diagnostic et de soins sont identiques dans toutes les sociétés chamaniques ; entrer dans le patient, devenir le patient, puis rétablir le sens de l’interrelation. Et tout ceci s’accomplit dans un état de conscience bien différent de celui avec lequel on conduit une voiture, rédige une ordonnance. Quant à l’addenda culturel des principes de base de la guérison, il dépend en grande partie des ressources locales pouvant servir de « médecine ». Un chaman n’emploiera que le pouvoir suprême de l’imagination. Les symboles et les rites ne sont nécessaires pour déclencher le mécanisme de guérison que dans les cultures ou les patients ne sont pas aussi éveillés que le chaman sur le plan spirituel. Anthologie du chamanisme : textes réunis par S. Nicholson.

Deux jours véritablement magiques viennent de s’écouler, demain nous reprenons la route pour Oulan-Bator.

Comme dans tout voyage bien équilibré, nous terminerons par un peu de culture en visitant le musée archéologique d’Oulan-Bator.

Sous le regard hiératique et autoritaire de Genghis Khan nous commencerons une visite passionnante

Nous embrassons toutes l’histoire de la Mongolie qui est magnifiquement expliquée de façon chronologique, partant du néolithique et se terminant par le scaphandre du premier cosmonaute mongol.

Une partie importante des salles d’exposition est évidemment consacrée à l’épopée du mythique Genghis Khan et à ses multiples conquêtes territoriales.

Gengis, littéralement : « souverain universel », d'abord nommé Temüdjin, est né vers 1155 dans l'actuelle province de Hentiy (Mongolie), mort en août 1227 dans l'actuel Xian de Qingshui (Chine), est le fondateur de l'Empire mongol, le plus vaste empire contigu de tous les temps.Issu d'un chef de clan de la tribu Bordjigin, il utilise son génie politique et militaire pour rassembler plusieurs tribus nomades de l'Asie de l'Est et de l'Asie centrale sous l'identité commune de « mongoles » ; il en devient le khan (dirigeant), puis le Tchingis Khagan (empereur ou chef suprême), avant de se lancer à la conquête de la Chine. À la fin de son règne, il contrôle une grande partie de l'Asie, avec, outre la Mongolie, la Chine du nord et la Sogdiane.Après sa mort, l'empire est considérablement agrandi par ses successeurs, qui le dirigent encore pendant plus de 150 ans. Son petit-fils, Kubilaï Khan, est le premier empereur de la dynastie Yuan en Chine.Pour les Mongols, qui le considèrent comme le père de leur nation, Gengis Khan est une figure légendaire entourée d'un grand respect. Mais, dans nombre de régions d'Asie ravagées par ses guerres ou celles de ses successeurs, il est considéré comme un conquérant impitoyable et sanguinaire.

Un des attraits majeur de ce musée est la magnifique collection de vêtements traditionnels et anciens.

Notre journée culturelle à Oulan-Bator se terminera par un concert de chants diphoniques .Le chant diphonique est une technique vocale permettant à une personne de produire un timbre vocal caractérisé par deux notes de fréquences différentes. Il s'agit donc de faire du chant polyphonique (à plusieurs voix) au moyen d'un seul organe vocal combinant d'une part divers types de voix (de poitrine, de tête…) et d'autre part divers positionnements de la langue ou des lèvres. La seconde voix, ou harmonique, est dans un rapport exact de fréquences avec celle de la voix de base.Ce type de chant est pratiqué depuis longtemps dans diverses musiques traditionnelles du monde, plus particulièrement en Haute-Asie (chez les Mongols, Touvains, Khakasses, Bachkirs, Altaïens, Mongols du Tibet notamment, voir Khöömei), et de manière plus discrète parmi les Sardes d'Italie, les Rajasthanis d'Inde et les Xhosa d’Afrique du Sud.

A travers les vitres de l’hôtel, un nouveau jour se lève sur Oulan-Bator et il est temps de rejoindre l’aéroport pour une longue journée de vol direction plein ouest. Il est clair pour tous que nous ne serons plus tout à fait pareils à la suite de ce voyage.

Mais n’est-ce pas là le véritable objectif d’un véritable voyage ?

Car si rien ne change, il ne s’agit que d’un simple déplacement.

FIN

Le prochain épisode de découvertes en terres chamanes aura lieu du 25 mai au 10 juin 2016 en Indonésie chez les hommes-fleurs Mentawaï de Siberut.

A suivre donc…